La clé de mon enfance



J'ai raconté il y a quelques temps la belle vie que l'on menait en ces années 50 ,alors que nous revenions du collège.(Petit souvenir de la 6e) . Mais une autre anecdote montre la différence de style de vie entre notre époque de folie voire de barbarie, et les anneés d'après guerre.
Mon père modeste employé de mairie ne gagnait pas beaucoup d'argent . Ma mère était obligée donc de travailler comme chemisière. Tous les deux partaient tôt le matin avant que je me mette en route pour l'école.
De même le midi où mes parents arrivaient bien après moi à la maison. Enfin et surtout , le soir je rentrais à la maison avant eux et les soirs d'hiver attendre dehors dans la nuit n'était pas très engageant.
Alors ,très vite j'ai eu "ma clé".
Je la revois comme si elle était là devant moi. Sa forme :extra plate, d'une longueur de 5ou 6 cm. Autour du cercle formant la tête de laclé, était gravé "incrochetable".
J'étais alors âgé de 8ans et demi . J'étais en CE2 à l'école de la rue Félix Pyat. Je gardais au début la clé dans la poche de mon pantalon . Mais une poche ,c'est parfois troué, et un petit garçon, n'a pas toujours le soin nécessaire à la garde de ces diables de clés qui ,dans ce cas comme dans d'autres, se font un malin plaisir de partir où bon leur semble.

Aussi après deux pertes successives de ces fameuses petites clés, mon père s'est résolu à l'attacher à une chaîne ,elle même attachée à un passant de mon pantalon. (J'ai pensé à cette clé lorsque que bien des années plus tard on attachera à une chaine fixée au ceinturon, mon fusil lors de la guerre d'Algérie)

Oui, à partir de 8 ans je fermais donc la porte de notre domicile le matin, parfois l'après midi et je réintégrais ma maison le midi et surtout le soir sans qu'il y ait personne dans la maison.
Car à cet âge on a beau faire "le grand", il n'empêche que dans la pénombre, les choses prennent des allures plutôt menaçantes. Ainsi dans le vestibule, juste derrière la porte palière, un rideau cachait un porte -manteau et des chaussures. Je passais devant assez rapidement sans trop regarder pour ne pas avoir l'impression que ces chaussures que j'apercevais, soient celles d'un "bandit" caché derrière .
Les soirs où mon imagination me jouait des tours, il m'arrivait de me mettre à l'abri sous la table de la cuisine , d'où je ne sortais que lorsque j'entendais la clé de mes parents dans la serrure de la porte d'entrée.

Cette petite peur mise à part, il est remarquable de penser que mes parents pouvaient sans inquiétude aucune ,donner la clé de l'appartement à un enfant de 8 ans et des poussières.

Triste signe de la dégradation de l'ambiance de vie . Qui oserait de nos jours faire la même chose avec son enfant ?


 

Retour à l'accueil général