Dernièrement
l'occasion m'a été donnée de me promener
sans autre but que de profiter de quelques moments de liberté.
Pouvoir déambuler dans les rues sans souci, sans penser
à rien si ce n'est de regarder autour de soi juste pour
le plaisir d'observer la vie qui passe. Tous ces héros m'attendaient
dans mes journaux : l'Intrépide, Vaillant, Coeur vaillant,
Les 3 mousquetaires du maquis....et j'en passe. C'était une petite guérite
hexagonale en bois, de couleur bleu ciel . Sa taille était
bien loin des monstres actuels. Elle devait mesurer 1.5m aux
endroits les plus larges, sa position au coin de la rue posait
bien des problèmes les jours de mistral. Ce kiosque était
tenu par les demoiselles Paulette et Joséphine Gainlet.
-Bonjour , vous avez la "semaine
radiophonique" ? (La télé n'existant pas encore
sur Marseille, on se contentait des programmes radio) Ou encore je me revois partir en courant de chez moi, courir encore dans la rue Junot puis la rue Hoche pour aller voir si l'Intrépide " était arrivé. Dès la sortie de mon couloir j'étais sur mon cheval et l'aventure commençait . J'avais rendez-vous avec Tarzan ou Kansas kid. L'odeur de ce kiosque m'est revenu l'autre matin lors de ma balade : cette odeur de papier imprimé, odeur indéfinissable . mais à quoi bon la définir . Pour moi c'était l'odeur de l'aventure où se plongeait mes dix ans. C'était aussi l'odeur d'un certain art de vivre. Tout n'était pas rose en ces temps, mais les choses étaient établies dns un ordre qui résultait de l'expérience, de la pratique. Ainsi ces deux demoiselles faisaient partie de mon univers. Leur kiosque était un peu comme dans le film Mary Poppins. C'était une sorte de fenêtre ouverte sur les aventures les plus extraordinaires. En même temps elles appartenaient au décors de ma vie. On peut aussi comparer tous ces acteurs comme les musiciens d'un grand orchestre où chacun jouait sa partition en harmonie avec les autres musiciens. Tout le monde connaissait les soeurs
Gainlet et elles connaissaient tout le monde. Encore aujourd'hui,
je les revois dans ma mémoire, rentrer à la maison
d'un pas lent et régulier à l'image de leur vie.
Elles portaient toujours un grand sac avec je suppose des invendus
. Peut-être préparaient-elles une provision de lecture
qui leur sert à tuer le temps maintenant qu'elles sont
passées à jamais dans l'autre image .
![]() pardon pour la mauvaise qualité du croquis, mais je n'ai jamais su très bien dessiner. |